« Il y a des malades qui ne seront pas pris en réanimation. On s’y prépare » Bertrand Guidet, chef du service de réanimation à l’hôpital Saint-Antoine, à Paris

 

 

Le facteur limitant, ce ne sera ni les locaux, ni les médicaments… Ce sera le personnel. Les 10 000 lits promis par le ministre de la santé, Olivier Véran, on n’y arrivera pas. En Ile-de-France, au pic de la première vague, on est monté à 2 700 lits, contre 1 100 en temps normal. Cette fois, on n’arrivera jamais à en ouvrir autant, car nous n’aurons pas le renfort des soignants d’autres régions et le personnel est fatigué.

Par ailleurs, il va falloir continuer à accueillir les patients non Covid. Au printemps, il n’y avait plus que 250 lits pour ces patients dans les services de réanimation franciliens. Il est inimaginable d’en avoir aussi peu dans les mois qui viennent : en décembre et janvier, les réanimations sont toujours pleines. Même si on arrive à ouvrir 2 200 lits, il faudra en garder environ 800 pour les patients non Covid, ce qui ne fait donc plus que 1 400 lits disponibles pour les cas graves de Covid. Comment va-t-on tenir dans la durée ? Il y a des malades qui ne seront pas pris en réanimation. On s’y prépare.

On peut avoir une approche égalitaire – une vie vaut une autre vie – ou une approche utilitariste – certains patients, par leurs caractéristiques, sont plus prioritaires que d’autres. Entre une mère de trois enfants et un homme de 80 ans, faut-il tirer au sort pour attribuer le dernier lit disponible ? Bien sûr que non. Mais en tant que médecin, choisir est un crève-cœur.

Les hivers, lorsque nous avons de grandes épidémies de grippe, nous sommes déjà confrontés à des choix difficiles. Il nous arrive de devoir sortir en urgence des malades pour faire de la place à un autre malade, pour lequel il y a une indication claire de réanimation. Sortir un malade sans que cela soit programmé, on sait que c’est une perte de chance.

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